Rien de mieux qu'un jolie petit lac

Abigael était venue se ressourcer près du lac cristallin qui se trouvait à mi-chemin entre le Nid des Dragons et la forêt environnant l'école. Elle aimait cet endroit : il dégageait une sorte de... calme, qui produisait sur Abigael une intense paix intérieure. Elle était fatiguée de tout ce qui se passait autour d'elle. Son amie et collègue Samera Albaro avait été assassinée et elle se retrouvait désormais seule directrice à la tête de l'école. Du vivant de Samera, sa magie de l'Ordre contrebalançait celle du Chaos d'Abigael, et l'école était en équilibre entre les deux. Mais maintenant que Samera n'était plus, la magie du Chaos dominait Dragonvale et l'Académie était devenu un lieu plus sauvage, plus puissant, qui puisait véritablement aux sources mêmes de la magie primitive du royaume d'Arven.

Abigael s'était laissée tomber au sol. Elle aimait le nouveau visage de l'école, les plantes qui poussaient à même la pierre, la chaleur réconfortante des feux de garde au sommet des tours, la saveur ambrée de l'air et le vertige qui la saisissait lorsqu'elle communiait avec tout cela à la fois. Mais il lui manquait la fraîcheur réconfortante des eaux limpides du lac. Elle était donc venue y tremper les pieds, observant la cascade qui dégringolait du Nid des Dragons dans la rivière qui serpentait non loin.

Sa sérénité fut titillée par la sensation d'une présence, mais il n'y avait personne alentour. Elle se concentra... et perçut une étincelle de vie au sein des Eaux profondes. A l'instant où elle prenait conscience d'une présence dans son lac, une nageoire fendit l'onde avant de replonger précipitamment.

Une... naïade ?!

Abigael avait échoué à les contacter, doutant que ses messages soient parvenus au peuple des sirènes, mais si jamais il s'en trouvait une dans son lac actuellement... il fallait tenter le coup. Inspirant un grand coup, elle rendit l'air de ses poumons inaliénable, afin de pouvoir bénéficier de tout l'oxygène qu'elle désirerait au fond de l'eau. Puis elle ôta sa robe de velours, ne gardant contre elle qu'une longue tunique de lin et ses bottes. Elle avança lentement dans l'eau, puis plongea sous les flots, ses longs cheveux sombres se répandant autour d'elle comme un halo bouclé.

Gênée par ses cheveux qui flottaient tout autour de son visage et envahissaient son champ de vision, Abigael ne pouvait pas voir clairement ce qui se passait dans ces eaux sombres. Elle se focalisa donc sur sa vision intérieure, projetant sa pensée le long des flots, sa conscience rayonnant sur tout le lac. Elle percevait clairement à présent un esprit sur le qui-vive non loin d'elle. Un esprit intelligent et rapide, mais légèrement différent d'un esprit humain. Cela concordait avec la nageoire qu'elle avait entraperçue. Il y avait une naïade dans ces eaux.

Abigael se propulsa en avant, ses cheveux rejetés derrière elle par le mouvement. En effet, une naïade venait de sortir de derrière un rocher et se maintenait prudemment à une certaine distance d'elle, apparemment indécise sur la marche à suivre. Son apparence était plutôt juvénile, indiquant une enfant, peut-être une adolescente - ce qui était difficile à juger, la morphologie des naïades n'évoluant pas à la même vitesse que celle des humaines.

Lady Abigael s'arrêta, flottant entre deux eaux. Elle venait de remarquer le diadème que portait la jeune créature. La façon dont il était ouvragé indiquait un membre de la famille royale - sans doute l'une des jeunes princesses. Que faisait-elle ici ? Les princesses étaient censées être soigneusement gardées. Si un membre de la famille régnante avait dû s'aventurer dans les parages pour espionner Dragonvale, ç'aurait été l'un des princes les plus âgés, pas une petite princesse à peine sortie de l'enfance.

D'un battement de jambes, elle se propulsa à la surface et se rapprocha du bord, avant de sortir de l'eau. Elle s'assit à la limite des vaguelettes, attendant que la sirène vienne lui parler, si telle était sa volonté.

"Bonjour. Je m'appelle Abigael Sahamdia. Je n'ai aucune mauvaise intention envers toi et ne te ferai aucun mal. Je t'en prie, considère ce lac comme le tien."

La jeune naïade pencha légèrement la tête sur la droite, se concentrant sur son interlocutrice. Cherchant à sondé son regard. Etait-elle sincère dans ses ses propos ou ne lui mentait-elle que pour mieux l'amadouer? Etrangement la princesse ne vit rien de tout cela dans son regard. Elle eut presque l'impression d'y voir de la bienveillance. Et puis elle lui disait de considère le lac comme sien, bien que Lluvia trouvait cette formule étrange, elle comprit que "Abigael", comme elle s'était présenté, n'avait dit cela que pour la mettre à l'aise. Même si les naïades n'avaient pas l'habitude de considérer un lac, ou une mer, comme un bien appartenant à quelqu'un. Certes lorsque quelqu'un disait "mon" lac, il y mettait plus ses sentiments qu'un réel sens de propriété. Mais peut-être était-ce ce que voulait dire cette humaine...

"Je suis Lluvia"

Une simple phrase. Mais que dire de plus? ...

[Contente de te revoir =D J'espère que tu vas mieux^^]

Un léger rire échappa à la toute-puissante directrice de l'Académie. Cette nouvelle élève était décidément toute pareille à ses autres élèves, lors de leur premier jour : incapable de concevoir l'étendue de ce qui devenait possible avec l'appui de la magie. Comme les autres, il lui faudrait du temps avant de pouvoir pleinement appréhender les possibilités qui s'offriraient à elle, une fois son apprentissage achevé. Des possibilités qui variaient beaucoup d'un élève à l'autre... Suivant le type de magie de chacun, l'ange tutélaire, l'élément-clé de leur pouvoir, tout pouvait changer. Lluvia appartenait logiquement au signe de l'Eau, mais il était possible que cela ne soit pas le cas et qu'elle se trouve affiliée à un autre élément. Pourvu qu'elle appartienne à la magie du Chaos, et son pouvoir serait immense... et très incontrôlable. Il faudrait qu'elle s'occupe de déterminer tout cela dès l'entrée de Lluvia à l'Académie.

Mais d'abord...

Elle leva l'index de sa main droite et fixa le vide devant Lluvia. Doucement, trèèèèès doucement, elle attira une bulle d'eau de deux mètres de diamètre, et l'entoura d'un sortilège qui lui donnait une forme fixe. Puis elle y envoya Lluvia elle-même d'un mouvement nonchalent du poignet.

"Voilà, très chère, qui devrait solutionner ce léger problème."

Abigael hocha la tête en souriant. C'était vraiment une très bonne chose que de compter une princesse naïade dans les rangs de ses élèves ! Il faudrait sans tarder qu'elle-même prenne contact avec la mère de Lluvia, la reine, pour l'informer des récents changements et de l'évolution de la situation de sa fille. En attendant, elle allait affecter Lluvia à une des Maisons de l'Académie...

Réfléchissant au caractère de Lluvia, Abigael envisagea les différentes possibilités qui s'offraient à elle. Azuraï ? Mmm, non, la jeune sirène avait le caractère bien trop trempé pour se plaire parmi les paisibles élèves de cette Maison. Lunemira, Solora ? Une des deux, sans aucun doute. Laquelle ?

Tout bien pesé, les studieux Lunemira étaient peut-être un brin trop sérieux pour Lluvia, petite princesse fantasque.

Lluvia, vous appartiendrez à la maison Solora. Je vous souhaite la bienvenue dans l'Académie !!